
« Introduction aux considérations réglementaires lors du lancement de solutions de réalité virtuelle aux Etats-Unis » est le premier article d’une série de contribution d’experts externes enthousiastes à l’idée de participer à la mission éducative de VRforHealth. Si la technologie de réalité virtuelle ancre, aujourd’hui, son statut dans le bien-être et pour des utilisations thérapeutiques, c’est grâce aux effort de chercheurs et cliniciens académiques, de start-ups créant de nouvelles solutions, de patients participants aux recherches, d’autorités réglementaires qui revoient l’efficacité et la sécurité de ces technologies. Nous accueillons des auteurs invités du « village » pour faire avancer ces nouvelles solutions.
Les auteurs de cet article sont Hélène Louys et Pol-Antoine Hamon. Hélène Louys est docteur en pharmacie & avocate, avec une expérience de plus de 15 ans en droit de la santé et règlementation des produits de santé ». Pol-Antoine Hamon est pharmacien hospitalier et titulaire d’un MBA, avec une expérience de 20 ans dans l’accès au marché des produits de santé.
Dans cet article, les auteurs décrivent l’environnement réglementaire en vue de la commercialisation de solutions de Réalité Virtuelle (RV) aux Etats-Unis. Cela inclut: la classification des dispositifs, les procédures d’enregistrement leurs définitions et de (rare) exemples.
Comme nos lecteurs le savent, la réalité virtuelle (RV) est une technologie qui recrée un environnement immersif ou 3D grâce à la combinaison de logiciels, de matériel et de conception avancés. La RV peut apporter des avantages cliniques directs aux personnes souffrant de multiples affections, notamment la douleur, l’anxiété et d’autres problèmes de santé mentale, ainsi que la réadaptation, comme le montre le site internet de VRforhealth dans cette section video.
Les solutions de RV sont considérées comme des dispositifs médicaux aux Etats-Unis et en Europe. Qu’est-ce qu’un dispositif médical?
Le « dispositif médical « est défini comme un instrument, un appareil, un outil, une machine, un artifice, un implant, un réactif in vitro, ou tout autre article similaire ou connexe, y compris tout composant, pièce ou accessoire, qui est:
- Reconnu dans le Formulaire National Officiel, ou la Pharmacopée des Etats-Unis, ou tout supplément à ceux-ci,
- Destinés à être utilisés dans le diagnostic de maladies ou d’autres conditions, ou dans la guérison, l’atténuation, le traitement ou la prévention de maladies chez l’homme ou l’animal, ou
- Destinés à affecter la structure ou toute fonction du corps humain ou de l’animal, et qui n’atteint pas ses objectifs principaux par une action chimique à l’intérieur ou sur le corps humain ou de l’animal et qui ne dépend pas d’une métabolisation pour la réalisation des principaux objectifs. [1]
Ensuite, les dispositifs médicaux sont classés en 3 catégories: Classe I, Classe II and Classe III [2]. Chaque classe est définie par l’utilisation prévue du dispositif et les indications d’utilisation. [3] Le choix de la classe est très important car il détermine la procédure d’enregistrement du dispositif sur le marché. [BS1] [LHI2].

Les 2 principales procédures d’enregistrement sont la notification préalable à la commercialisation (pre-market notification (510(k)) et l’autorisation avant la commercialisation, « pre-market approval » (PMA), (principalement pour les dispositifs de classe III). Pour un dispositif à risque faible à modéré, la procédure De Novo [BS3] [LHI4] peut être une option. La soumission De Novo permet au promoteur de soumettre une demande à la FDA afin de classer un dispositif médical pour lequel le promoteur pense qu’il n’existe pas de dispositifs similaires sur le marché (« predicate device »), sans avoir à soumettre au préalable une notification 510(k).
Une notification 510(K) est une soumission avant commercialisation déposée auprès de la FDA pour démontrer que le dispositif à commercialiser est aussi sûr et efficace, c’est-à-dire substantiellement équivalent, à un dispositif déjà commercialisé (section 513(i)(1)(A) FD&C Act) et qui n’est pas sujet à une autorisation préalable (PMA).
Un « predicate device » (PD) est un dispositif médical qui peut être légalement commercialisé aux Etats-Unis, et qui est utilisé comme comparateur pour un nouveau dispositif médical cherchant à obtenir une autorisation de la FDA via la procédure de notification préalable à la commercialisation 510(k) de la FDA.
En ce qui concerne le contenu du dossier de soumission, les exigence générales sont:
- Contrôle de la conception (chaque fabricant de classe III ou II et éventuellement de classe I doit établir et maintenir des procédures pour contrôler la conception du dispositif[4]);
- Tests non cliniques;
- Preuve clinique;
- Etiquetage.
Les solutions de RV appartiennent à la classe II comme cela est démontré ci-dessous. Pour illustrer les différentes options de soumissions, nous nous concentrerons sur les 2 premières et, jusqu’à présent seules solutions autorisées par la FDA. [BS5] [LHI6] [LHI7] .
EaseVRx, désormais RelieVRx, de AppliedVR est la première solution thérapeutique de RV à avoir été approuvée par la FDA, en tant que système de réalité virtuelle immersif sur ordonnance destiné à fournir un traitement d’appoint, basé sur des compétences de thérapie cognito-comportementale et autres méthodes comportementales pour des patients (âgé de 18 ans ou plus) ayant reçu un diagnostic de lombalgie chronique (définie comme une douleur modérée à sévère et durant plus de 3 mois). Le dispositif est destiné à une utilisation à domicile pour la réduction de la douleur et des interférences associées à la lombalgie clinique [6].
La FDA l’a évalué via la procédure De Novo. Afin de classer RelieVRx dans la classe I ou II, la classe proposée devait répondre aux contrôles réglementaires [7] (voir tableau ci-dessus) [BS8] [LHI9] qui permettaient d’assurer raisonnablement la sécurité et l’efficacité du dispositif pour son utilisation prévue [BS10] [LHI11] .
Après avoir examiné les informations soumises dans la demande De Novo, la FDA a déterminé que, pour les indications d’utilisation précédemment énoncées, RelieVRx pouvait être classé comme dispositif de classe II avec la mise en place de contrôles spéciaux relatifs à la classe II.
Cette action crée une nouvelle classification réglementaire, ce qui signifie, que les dispositifs ultérieurs du même type avec la même utilisation peuvent soumettre leur demande via la procédure 510(k) par laquelle ces derniers peuvent obtenir une autorisation de mise sur le marché s’ils démontrent une équivalence substantielle à un « predicate device » [8].
Il est également intéressant de noter que RelieVRx a reçu la désignation de « breakthrough device ». Le programme « Breakthrough Devices » offre aux fabricants une opportunité d’interagir avec des experts de la FDA du « Center for Devices and Radiological Health » ( CDRH) [9] à travers différentes options du programmes pour aborder efficacement les sujets au fur et à mesure qu’ils surviennent pendant le développement, l’evaluation et l’examen préalable à la commercialisation. Avec ce statut, les fabricants reçoivent des commentaires en temps opportun et peuvent s’attendre à un examen prioritaire de leur demande. [10].
En 2021, le CDRH a attribué à 13 dispositifs la désignation de « breakthrough device ». Cela reflète le dévouement des équipes du CDRH à aider l’industrie à commercialiser des dispositifs innovants. Il sera intéressant de voir, dans les année à venir, combien de solutions thérapeutiques de RV seront autorisées, maintenant qu’il existe un « predicate device » (RelieVRx).
La seconde solution de RV autorisée à ce jour par la FDA est InVisionOSTM. Bien qu’il s’agisse d’un outil de planification préopératoire de RV, il est important de connaître cette autorisation de la FDA. Le logiciel InVisionOSTM[BS12] [LHI13] convertit automatiquement la tomodensitométrie (TDM) du patient à partir de n’importe quel PACS (système d’archivage et de transmission d’images) en une reconstruction 3D en quelques secondes. Les chirurgiens peuvent ensuite utiliser l’Oculus Quest 2 pour visualiser, manipuler et isoler les zones anatomiques pertinentes avant d’effectuer l’intervention chirurgicale proprement dite [11].
La FDA a délivré le 10 novembre 2021, une autorisation 510(k) pour cet outil de planification pré-opératoire, qui est une notification préalable à la commercialisation par laquelle la FDA « approuve » la commercialisation d’un dispositif médical. Dans cette procédure de notification préalable, les promoteurs du dispositif doivent établir que leur dispositif est « substantiellement équivalent » à un dispositif légalement commercialisé. Ce dernier est appelé dispositif « predicate », comme déjà expliqué ci-dessus.
Le dispositif est soumis aux dispositions générales de la loi sur la commercialisation, qui comprennent les exigences d’enregistrement annuel, la liste des dispositifs; les bonnes pratiques de fabrication, l’étiquetage et les interdictions de marque erronée et de falsification [12].
Les considérations réglementaires ne s’arrêtent pas une fois les solutions de RV commercialisées. Les fabricants, les distributeurs, les importateurs ont des obligations relatives aux exigences des systèmes qualité ou des Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF) mais aussi relatives aux exigences d’emballage et d’étiquetage, de vigilance te de publicité.
Denise Silber, VRforHealth, remercie les auteurs pour leur contribution!
Références
[1] Section 201(h) du Federal Food, Drug and Cosmetic Act (FD&C Act)[2] 21 CFR Part 860
[3] FD&C Act 513, [360c], Classification des dispositifs médicaux pour une utilisation chez l’homme
[4] 21 CFR 820.30
[5] https://www.fda.gov/medical-devices/device-advice-comprehensive-regulatory-assistance/how-study-and-market-your-device
[6] Classification order, EasyVRx, DEN210014
[7] Les contrôles généraux sont des exigences réglementaires décrites dans les sections suivantes du FD&C Act: 501 (Dispositifs falsifiés), 502 (Dispositifs mal étiquetés), 510 (Enregistrement des producteurs de dispositifs), 516 (Dispositifs interdits), 518 (Notifications et autres recours), 519 (Dossiers et rapports sur les dispositifs), et 520 (Dispositions générales concernant le contrôle des dispositifs destinés à l’usage humain).
Les contrôles spéciaux sont des exigences réglementaires pour les dispositifs de classe II. La FDA classe les dispositifs dans la classe II quand les contrôles généraux seuls sont insuffisants pour assurer raisonnablement la sécurité et l’efficacité d’un dispositif, et pour lesquels il existe une information suffisante pour établir des contrôles spéciaux pour fournir une telle assurance. Les contrôles spéciaux sont habituellement spécifiques au dispositif et comprennent: les normes de performance, la surveillance après commercialisation, les registres de patients, les exigences d’étiquetage spécial, les exigences en matière de données avant la commercialisation, les lignes directrices.
[8] FDA News release, November 16, 2021: FDA authorizes marketing of virtual reality system for chronic pain reduction
[9] La FDA américaine réglemente les dispositifs médicaux pour garantir leur sécurité et leur efficacité. Le contre principal de la FDA pour la gestion des opérations réglementaires relatives aux dispositifs médicaux et le « Center for Devices and Radiological Health » (CDRH). Le CDRH se compose de plusieurs sous-bureaux au sein de la FDA, qui sont structurés pour gérer différentes classes de dispositifs médicaux.
[11] https://www.precisionostech.com/preoperative-planning/
[12] InVisionOSTM, autorisation 510(k)